10. Le sommeil et le fonctionnement du cerveau

 

   Le sommeil et le fonctionnement du cerveau sont de plus en plus connus grâce à l’imagerie cérébrale. Les travaux de Stanislas Dehaene, de Ghislaine Dehaene-Lambertz et de Lucie Hertz-Pannier sont très importants. Ils ont osé mettre des enfants dans une IRM (Imagerie Résonance Magnétique, scanner), le jour puis la nuit. Constat : les neurones qui ont travaillé le jour se remettent au travail la nuit ! D’où la création de nouvelles connexions, de nouveaux liens entre les synapses, un accroissement du stockage, une amélioration de la mémorisation et de la compréhension. Une consolidation de ce qui a été étudié pendant le jour.

   Ainsi, pendant le sommeil, le cerveau double la mise. Si un apprentissage est échelonné en 8 séquences, le cerveau va doubler la mise plusieurs fois au lieu d’une seule, il fixera plus solidement les connaissances stockées.

   Jérôme Bruner avait introduit en 1960 la notion de pédagogie spiralaire. Les programmes d’apprentissages devraient être établis, selon lui, comme sur une spirale, de sorte que les élèves construisent de façon régulière sur ce qu'ils ont déjà appris. Stanislas Dehaene explicite cette idée très simplement : « Il vaut mieux distribuer l’apprentissage que le regrouper en une seule fois. Si on a 2 heures d’apprentissage, il vaut mieux 1/4 d’heure pendant 8 jours qu’une seule fois 2 heures ».

   Anecdote avec le Doyen de la Faculté de Médecine de Nice. Pendant une période, des résultats excellents des étudiants en médecine de Nice aux divers concours nationaux. Explication : le doyen a rendu obligatoire le tutorat. Les étudiants de 2ème année deviennent les tuteurs de ceux de 1ère année. Les étudiants de 3ème année deviennent les tuteurs de ceux de 2ème année… Ainsi les étudiants voient le programme deux fois, comme étudiants d’abord puis comme enseignants ensuite. Ce système est aujourd’hui généralisé.

   Nous rejoignons Richard Feynman qui dit qu’on comprend mieux quelque chose en l’expliquant aux autres, en l’enseignant. Il faut ainsi inviter les enfants à se rencontrer, à travailler en groupe, à expliquer les choses à haute voix (c’est la verbalisation).

   Cet enseignement distribué en plusieurs fois ou spiralaire a été repris avec succès dans la méthode de Singapour.

  Ainsi, le sommeil joue donc un rôle fondamental dans le recyclage des neurones. C’est important pour le long terme. Mais aussi pour le court terme : on a constaté qu’une demi-heure de sommeil de plus par nuit suffit pour améliorer la moyenne d’un élève. Insistons sur la qualité et la durée du sommeil. Stanislas Dehaene (Apprendre ! page 310) propose de "différer l'entrée à l'école d'une demi-heure ou d'une heure", il dit que "tout change :  les adolescents dorment mieux, leur absentéisme se réduit, leur attention en classe augmente, et leurs performances scolaires s'améliorent." (et bien d'autres avantages encore !)

   Mais, attention, la consommation du cerveau d’un jeune enfant atteint 50 % du bilan énergétique : il faut donc lui procurer une alimentation équilibrée, mais aussi, son oxygénation et de l’exercice physique.

   Plusieurs situations sont néfastes aux neurones (stress, humiliations, émotions non contrôlées…). Pas de panique, ces sacrés neurones ont une propriété des plus intéressantes : la plasticité ! Disons qu’ils sont capables de réagir, de s’adapter, de se régénérer… si on sait réagir positivement.